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La démocration et le pouvoir – Par Professeur Abdoulaye NIANG

Introduction

Prof Niang

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La démocratie comporte deux grandes dimensions fondamentales dans son expression : l’une revêt un caractère institutionnel et légal et consiste d’un coté dans l’existence d’institutions (séparations des pouvoirs) et de cadres formels de  tout ordre  qui la représentent( les libertés multiples), et de l’autre les lois et règles appropriées qui  doivent régir leur fonctionnement (Constitution, code électoral, etc.); quant à l’autre, elle a une nature pratique, populaire, et a des fois un caractère subversif, voire institutionnalisant. Ces deux dimensions qui caractérisent, dans leurs articulations multiples et l’évolution de celles-ci, la dynamique vivante de la démocratie, font que celle-ci se balance constamment entre, d’une part, l’exigence d’ordre et de conformité et, de l’autre, la tendance, de fait, de s’en écarter ou de la remettre en cause, afin que puisse survenir un autre ordre nouveau.

La dimension institutionnelle et légale est la référence à partir de la quelle  doit être contrôlée et managée par les dirigeants la pratique de la démocratie par le peuple, tandis que la dimension pratique,  populaire et institutionnalisante, est à la fois la manifestation réelle du vécu par le peuple de la démocratie et l’expression de ses nouvelles aspirations pour celle-ci : elle est souvent faite d’actions populaires de conquête ou de défense de libertés, d’oppositions à l’injustice, l’oppression, etc., et suivant, des fois, des voies qui peuvent s’écarter, évidemment, de celles qui sont légales, mais dont l’application est jugée inopportune, illégitime, par une fraction importante du peuple en action, en un moment donné.

Les identités démocratiques et les modes d’alternance politique

Quoi qu’il en soit, les deux dimensions, ci-dessus décrites, constituent, dans leurs façons de s’articuler réciproquement, les convergences  ou les contradictions multiples de leurs éléments, l’essence même du moteur de la démocratie ; l’identité réelle de celle-ci résidant dans la manière particulière et  récurrente avec la quelle ces articulations, convergences et contradictions se manifestent et sont gérés habituellement par les  gouvernants, les effets et impacts plus ou moins durables dans la conscience collective de ces diverses manifestations : c’est la constance de la nature de ces manifestations, et surtout, du niveau d’exacerbation des contradictions entre ces deux dimensions, du mode de résolution habituellement adopté, et qui révèle, il faut le dire, une vision dominante de gouvernance politique, qui fonde, en dernière analyse, dans la conscience collective une perception dominante sur le type de democratie servi au peuple, ainsi que sur le degré de stabilité politique du pays concerné ; toutes choses qui confèrent à ce dernier une identité démocratique particulière; identité qui se situe dans une échelle graduée de convergence ou de contradiction du rapport entre, d’une part, l’action populaire et l’action publique et, de l’autre, la légalité institutionnelle et la légitimité populaire : quand l’action publique et la légalité institutionnelle s’imposent sur l’action populaire et la légitimité populaire, mais n’arrivent pas malgré tout à contenir tout à fait l’action et les aspirations du peuple, alors le régime de democratie en place a non seulement  perdu la confiance de ce dernier, mais aussi n’inspire plus, par son appareil de répression, aucune crainte à celui-ci, d’où le risque d’accroissement de son instabilité politique , le quel sera provoqué par de nombreuses contestations débordantes; mais quand l’action populaire et la légitimité populaire sont dans un rapport de convergence avec l’action publique et la légalité institutionnelle, alors le régime de democratie en vigueur bénéficie d’un crédit de confiance élevé du coté du peuple et peut jouir d’une grande présomption de bonne gouvernance, d’où la stabilité politique qui peut le caractériser du fait de la rareté de contestations populaires. Entre ces deux modèles extrêmes des variantes existent qu’il faut chaque fois bien caractériser pour bien cerner l’«identité démocratique» du régime.

Si c’est la nature du rapport du peuple à l’action publique et à la légalité institutionnelle, et le niveau du vécu subjectif de ce rapport qui, en définitive, déterminent l’aspiration et la  volonté de changement de régime du peuple, alors quatre cas de figure se présentent pour les prémices annonciatrices de ce changement:

  • la démocratie institutionnelle et légale fonctionne, mais ne répond plus par ses lois et règlements, les pratiques concrètes de gouvernance dans divers domaines sociétaux, etc., à la volonté populaire de changement. Dans ce cas, alors, ce sont les actions collectives populaires, avec leurs manifestations subversives et de défiance par rapport aux institutions, leurs élans institutionnalisants, les rumeurs et propos populaires des fois désobligeants portant sur le régime en place et ses dirigeants, etc., qui vont déstabiliser ces derniers et susciter, au travers du désordre social et politique qu’elles vont momentanément installer, un autre ordre démocratique : cela peut intervenir avec l’avènement d’une alternance démocratique plus ou moins apaisée ou d’un bouleversement politique d’un autre ordre, tout ne dépendant que du rapport de force entre le peuple dans sa volonté de changement et le régime en place dans sa capacité de résistance et de négociation ;
  • la democratie institutionnelle et légale et les actes de gouvernance posés  répondent favorablement à la volonté et aux aspirations populaires : les mouvements sociaux de contestation contre des mesures prises par le régime politique en place sont rares, et il en est de même des actes individuels ou collectifs de défiance par rapport aux institutions. Par contre, les marques spontanées, et non encadrées de satisfaction au régime politique, qu’elles soient individuelles ou de groupe, verbales ou physiques, sont nombreuses et s’intègrent dans une ambiance générale de sympathies nourries en direction du régime et de ses dirigeants. Une telle situation qui manifeste une adhésion d’une partie importante du peuple aux politiques menées et au type de gouvernance affiché donne une garantie au régime politique en place pour sa reconduction démocratique apaisée, ainsi que pour une  continuité durable de ses actions de changement. Ici le respect populaire voué au régime et ses dirigeants se manifeste souvent à travers leur défense spontanée et majoritaire par des groupes de citoyens anonymes en cas d’attaques de la part de leurs détracteurs ;
  •  la democratie institutionnelle et légale fonctionne, mais les pratiques réelles de gouvernance n’agréent pas le peuple. Mais, contrairement au premier cas de figure où le peuple manifeste par diverses formes son mécontentement contre le régime politique en place et ses dirigeants, ici il opte, surtout quand l’expression publique de la democratie est contrainte par des répressions ou interdictions systématiques, pour une  attitude tout à fait différente : il ne va pas chercher à occuper tout le temps, avec fracas, les rues, les places publiques et les medias, mais sa réaction contestataire et oppositionnelle la plus courante se manifestera quotidiennement dans les conversations au niveau des grands places et autres lieux de palabre, des marchés, des bus, des cars rapides, des 7 places, etc., les quels fonctionneront alors désormais  comme des espaces privilégiés de l’expression de la democratie populaire; ce désaveu par le peuple du régime politique, en ces formes là, va trouver ses manifestations les plus radicales, les plus politiques et les plus collectives, dans les périodes électorales, et sous la  forme d’un rejet par le verdict des urnes du régime en place. Un tel régime ne dure, en général, que le temps d’un mandat, à moins qu’il ne se transforme pour avoir une durabilité plus longue en une véritable « dictature institutionnelle » et répressive ;
  • La democratie institutionnelle et légale, ainsi que les actes de gouvernance posés, est satisfaisante pour le peuple ; mais, néanmoins un activisme politique volontariste et contestataire, et tous azimuts, plonge le pays dans une ambiance de « chat et souris » entre les partisans de l’opposition et ceux du régime en place. L’atmosphère insurrectionnelle régnante est trompeuse, quant à ses soubassements subjectifs, les quels sont plus politiciens que citoyens et populaires. Dans ce cas, le peuple apeuré par le climat d’insurrection permanent et aspirant à une paix sociale durable optera pour la solution qui va le débarrasser soit, des cibles des « insurrectionnistes», soit de ces derniers eux-mêmes, tout ne dépendant, en définitive, que du niveau de psychose du peuple pour la sécurité des personnes et des biens,  et de l’état du rapport de force entre les parties en conflit. Dans une situation du genre, ce qui va déterminer la conduite électorale du citoyen ce n’est pas son aspiration pour demain, réalisable à travers un programme politique, mais son instinct de paix et de survie.

La légitimité comme enjeu politique         

Dans tous les cas, dans les pays de democratie en voie de développement, le risque est bien toujours réel de voir les tenants du pouvoir instrumentaliser les institutions aux fins de créer les conditions légales ou non qui vont leur permettre de rester le plus longtemps possible au pouvoir, et des fois contrairement aux vœux des populations, ce qui peut évidemment entamer leur crédibilité et leur légitimité mêmes.

En effet, même si les tenants du pouvoir peuvent pendant un certain temps bénéficier d’une légitimité populaire qui entraine du coté du peuple une tolérance par rapport à leurs écarts en matière de gouvernance, voire, une acceptation de lois « politiques » de confirmation et de renforcement de leur pouvoir, lequel peut des fois même prendre l’allure d’une dictature par certains de ses aspects, il n’empêche qu’à à la longue, et à la faveur d’une prise de conscience populaire et citoyenne rendue possible par les erreurs et errements du régime,  l’action d’alerte et d’éveil la société civile, des medias et de l’opposition, il va y avoir, inévitablement, une perte progressive de légitimité pour un tel régime, qui va finir par devenir insupportable pour la grande masse.

Mais,  c’est quoi la légitimité et la légalité dont il a été question tout au long de ce qui précède, mais dont la compréhension que les uns et les autres ont peuvent beaucoup différer ?

Si la légalité peut être clairement définie, et son niveau mesuré, car se référant toujours par rapport à des règles, des lois, des critères objectifs de mesure déjà là, par contre, il n’en est pas de même pour la légitimité qui est un concept aux contours bien imprécis.

En effet, la légitimité, contrairement à la légalité qui se mesure par rapport aux degrés de conformité, dans la pratique, des actes posés par rapport aux lois,  règles ou autres critères de référence éditées, n’a de mesure que dans l’envergure plus ou moins grande des mouvements sociaux qui s’en réclament, la clameur populaire plus moins persistante  qui la manifeste, ou encore dans le plébiscite électoral des citoyens dont la conduite électorale s’y réfère principalement. Ce comportement collectif est,  à ne pas en douter, inspiré par un système partagé de représentations construit progressivement, et s’exprimant globalement dans une «conduite éthique» populaire, la quelle sera forcement favorable à un jugement de légitimation déterminée pour tel ou tel acte de gouvernance, pour tel ou tel  régime politique.
Pour fonder cette « conduite éthique », qui est considérée comme la seule qui est bonne, ou à tout le moins la meilleure à un moment donné pour un fait ou un régime  déterminés, des valeurs et  normes portant sur la moralité des dirigeants et la justice qu’ils rendent, leurs rapports aux religions, la primauté accordée entre leurs intérêts personnels et familiaux d’un coté et ceux de la patrie, de la nation, de l’autre, ou encore sur d’autres considérations ayant trait à la race,  l’ethnie, ou portant sur la situation économique, politique, sociale du moment, etc., c’est selon les peuples, les nations, les époques, les situations ponctuelles, les révélations des medias, etc., ont dû se combiner suivant une hiérarchie spécifique et une cohérence déterminée, afin de constituer le justificatif idéel et idéal, c’est-à-dire  le référentiel social dominant, qui va conférer le jugement de légitimation sur un fait, un régime politiques déterminés. Si les valeurs qui fondent ce jugement sont fortes, et, si en plus, leur charge affective ou émotionnelle positive, ainsi que leur capacité à motiver une mobilisation populaire, est élevée, alors la légitimité est grande ; à l’inverse, elle demeure faible, surtout si les variables déterminantes sont faibles elles-mêmes. De même, plus un peuple est divisé dans ses valeurs de référence, soit en terme de hiérarchisation, soit en terme de situation d’application,  moins il va s’accorder sur une seule légitimité, c’est-à-dire sur un même système cohérent et hiérarchisé de valeurs de légitimation.

Le mode de légitimation (le processus, les valeurs en jeu et situations en jeu, etc.) et la légitimité elle-même, sont donc bien quelque chose de variable pour un même objet, selon les nations, les  peuples, les périodes et situations. Cependant, là où elle existe sur un point donné, elle  demeure l’expression la plus populaire et la manifestation la plus totale, la plus globale,  la plus chargée de valeurs et la plus intégratrice,  car c’est bien elle qui manifeste, avec le plus d’exactitude, la structure qualitative de l’état d’âme du peuple ou d’une partie de celui-ci, sur un problème donné, à un moment donné. C’est le niveau de  légitimité qu’un peuple confère à un régime donné et à un moment donné qui détermine  l’essence et la régularité de sa conduite collective à l’égard de ce dernier.

Mais, quoi qu’il en soit, vu que la visée de la légitimité est toujours en dernière analyse d’être au service d’une politique, et en l’occurrence, celle qu’elle cautionne selon l’éthique qui la domine, on peut dire qu’elle est donc, aussi, une prise de position éthico-politique du peuple ou de ses parties, à une étape donnée de son histoire, toujours changeante. De ce point de vue, on peut penser que toute légitimité populaire nouvelle forte conférée à un acte ou un fait déjà posé ou à poser est un appel, une aspiration à un nouvel ordre de vision et de légalité, donc à un autre ordre de gouvernance qui devra se mettre en place pour conduire cette vision et cette légalité nouvelles. Ainsi, la légitimité, même si elle ne peut être mesurée, peut cependant constituer, la base de l’orientation et de la définition des termes de la nouvelle mesure de légalité et de ceux  de la nouvelle gouvernance à mettre en place. De ce fait, elle constitue un enjeu politique important du changement social. Mais selon le peuple, quels sont les déterminants fondamentaux de la légitimité de l’action politique ? Autrement dit, quelles sont les valeurs fortes qui intégrées orientent la conduite collective et fondent le jugement du peuple sur la légitimité qui accorde à un régime donné ? C’est en interrogeant le peuple sur cette question dans les écoles, les universités, les marchés, les boutiques, les rues, les entreprises, les champs, les berges des fleuves et les plages des mers, les parcours de transhumances du bétail et dans les espaces de rencontre de la diaspora que l’on aura une réponse à cette question fondamentale. Mais la meilleure interrogation et la réponse la plus claire ne sont-elles pas données par les bulletins de vote et le résultat des urnes

Que Dieu sauve le Sénégal

Abdoulaye NIANG
Professeur Titulaire de Sociologie
Université Gaston Berger de Saint-Louis