Jack Ma, emblématique fondateur d’Alibaba, a affirmé mercredi à Davos les ambitions du géant chinois de l’e-commerce en Afrique et salué le potentiel du continent, qu’il juge plus accueillant qu’une Europe « trop inquiète », à l’heure où l’expansionnisme économique de Pékin alarme l’Occident.
L’Afrique « ressemble à la Chine d’il y a vingt ans, avec tant de jeunes gens qui ne redoutent pas l’avenir. L’Europe s’inquiète de demain, l’Afrique pas », s’est enthousiasmé Jack Ma lors d’une conférence au Forum économique mondial.
« Aujourd’hui, le monde est miné par la suspicion. L’Europe s’inquiète trop: on y demande +Comment peut-on réguler ceci ? Comment peut-on se protéger ?+ (…) Du coup, nous n’allons pas d’abord dans les pays européens, nous allons là où l’on croit en nous, en Afrique », a-t-il insisté, aux côtés du président rwandais Paul Kagame.
C’est au Rwanda qu’Alibaba a lancé début novembre sa première plateforme de commerce électronique en Afrique, dans l’objectif de muscler les échanges sino-africains. Le continent est choyé par Pékin et les entreprises étatiques chinoises à coups d’investissements colossaux.
« Le Rwanda va être le plus important +hub+ en Afrique, et ceux qui y auront prospéré essaimeront sur tout le continent », a assuré M. Ma devant un parterre de responsables économiques réunis dans la station de ski suisse.
Pour lui, l’Afrique, forte d’1,2 milliard d’habitants et d’une population jeune, offre un potentiel colossal aux firmes technologiques, à la condition d’infrastructures Internet « accessibles pour tous », de dépenses accrues dans l’éducation, mais surtout de gouvernements soutenant jeunes entrepreneurs et petites firmes.
« Les gouvernements (en Afrique) doivent être transparents. Ils ne doivent pas couper l’Internet: s’ils le font, ils se nuisent à eux-mêmes », a insisté le fondateur d’Alibaba, dans une possible allusion au récent black-out de l’Internet en République démocratique du Congo.
Évoquant les inquiétudes sur l’intelligence artificielle, la cybersécurité et le stockage des données, Jack Ma a par ailleurs suggéré que l’essor de nouvelles technologies pouvait conduire à un conflit mondial.
« La Première Guerre mondiale était due à la première révolution technologique. La seconde révolution technologique a causé le second conflit mondial. Et voici la troisième révolution technologique, nous venons », a commenté Jack Ma, sans s’expliquer davantage. Un austère avertissement qu’il avait déjà fait dans le passé.
Mais mercredi à Davos, il a aussitôt insisté sur les « bienfaits » et créations d’emplois que le globe peut tirer des innovations technologiques.
« Pour un grand groupe, dire +ne faites pas le mal+ (le slogan historique de Google, NDLR) n’est pas suffisant. Encore faut-il faire de bonnes choses pour l’avenir », a-t-il martelé, affichant son ambition pour les cinq ans à venir: un « écosystème » permettant « aux petites entreprises de partout de vendre et d’acheter à l’échelle du globe ».
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