L’historien sénégalais Omar Guèye, enseignant-chercheur à l’Université Cheikh Anta Diop (UCAD), estime que les « mêmes méthodes » ont prévalu lors de la grève de Mai-68 et la crise actuelle dans les universités sénégalaises marquée par des revendications portant sur les bourses et les affrontements entre forces de l’ordre et étudiants.
« Si je fais le parallèle entre Mai-68 et aujourd’hui même, c’est toujours la question des bourses qui se pose. En Mai-68, autant on avait posé la question de faire bénéficier la bourse à tous avec l’arrivée massive des étudiants au campus », a-t-il dit dans un entretien avec l’APS.
En 1968, l’Université de Dakar était la 18ème université française, donc ‘’une université française dans ses méthodes et dans sa composition par le corps professoral, le recteur et le curriculum’’, a rappelé l’historien, auteur de « Mai-68 au Sénégal. Senghor face aux étudiants et au mouvement syndical », publié récemment chez Khartala.
Pr Guèye a indiqué que la « Réforme Fouchet », initié en France lors de l’année scolaire 1965-1966, avait décidé de supprimer la première partie du baccalauréat qui constituait « une sorte de filtre » par lequel devaient passer les élèves de la classe de Première pour aller en classe de Terminale au lycée.
Au Sénégal, sa suppression a entraîné une augmentation des effectifs de Terminale, et en conséquence, une augmentation du nombre de bacheliers lors de l’année universitaire 1967-1968, a-t-il expliqué.
« Il fallait donc trouver une formule pour faire bénéficier la bourse à un grand nombre d’étudiants », a souligné Omar Guèye, ajoutant que le gouvernement avait pris deux mesures : la diminution du taux de la bourse et la diminution des mensualités (10 mois au lieu de 12 mois).
Les étudiants ont évidemment rejeté ces mesures et c’est ce qui a conduit à l’escalade, a dit l’auteur de l’essai « Mai-68 au Sénégal ». « En 68, il y avait la question des bourses et des effectifs qui se posait. Et ça se pose de la même façon exactement encore aujourd’hui où la population estudiantine est multipliée par N, au niveau de la revendication’’, a analysé l’enseignant-chercheur à l’UCAD.