D’après ses perspectives économiques dévoilées le 8 janvier, la Banque mondiale s’attend à ce que l’Afrique tire son épingle du jeu dans un contexte mondial modérément rassurant.
La machine économique mondiale repartira en 2020 à toute petite vitesse sous l’effet d’un « redressement progressif des investissements et des échanges, après leur affaiblissement marqué de l’an dernier », prédit l’institution de Bretton Woods dans son rapport sur les « Perspectives économiques mondiales ». La croissance économique de la planète devrait atteindre cette année 2,5 %, après 2,4 % en 2019.
Il s’agit d’une moyenne qui recouvre une grande différence de dynamisme entre les économies avancées qui ne dépasseraient pas +1,4 %, car plombées par la faiblesse de leurs activités manufacturières d’une part, et les pays émergents et en développement qui atteindraient +4,1 %, d’autre part.
L’Afrique affiche le même contraste entre les pays qui progressent, au moins sur le papier, à toute allure et ceux qui connaissent des difficultés.
Vitalité de la zone franc
On remarquera tout d’abord que les pays exportateurs de matières premières sont peu dynamiques, alors que les pays qui en sont privés réalisent en général de bons scores. Autre constat, la zone franc se porte bien avec un taux de croissance de 5,1 %, malgré la mollesse de la conjoncture en Afrique centrale.
En Afrique subsaharienne, les cinq champions annoncés pour 2020 sont le Rwanda (+8,1 %), la Côte d’Ivoire (+7 ,3 %), le Sénégal et le Ghana (+6,8 %), et le Bénin (+6,7 %). On notera que le champion éthiopien, qui enchaînait depuis dix ans des records, « ralentit » à +6,3 %.
La liste des cinq retardataires comprend les deux seuls pays en récession du continent, la Guinée équatoriale (-2,3 %) et le Soudan (-1,4 %), ainsi que le Lesotho (+0,7 %), la Namibie et l’Afrique du Sud (+0,9 %).
Croissance de la dette
En Afrique du Nord et au Moyen-Orient, la croissance est moins soutenue, hormis à Djibouti (+7,5 %) et en Égypte (+5,7 %). Le Maroc (+3,5 %) ne fait pas les frais des troubles qui entravent la Tunisie (+2,2 %) et l’Algérie (+1,9%). On notera que la Libye a disparu des radars de la Banque mondiale, vraisemblablement en raison de la crise actuelle et qui empêche la tenue de statistiques crédibles.
Le rapport note que la réalisation de ses prévisions dépend de l’absence d’aggravation de la guerre commerciale déclenchée par les États-Unis contre la Chine qui a eu pour effet de ralentir les échanges et de faire pression sur les cours mondiaux des matières premières.
Il analyse aussi longuement la montée spectaculaire de la dette dans le monde entier en la comparant aux trois autres vagues d’accumulation de la dette qui se sont produites depuis 1970. Le constat est inquiétant : « la dernière vague qui a débuté en 2010 est celle au cours de laquelle la dette a augmenté le plus fortement, le plus rapidement et le plus largement », peut-on y lire.
Éviter de nouveaux plans d’ajustement
On pourrait espérer que le coût extrêmement faible de l’argent dans le monde permette d’éviter une crise financière. « La faiblesse des taux d’intérêt mondiaux n’offre qu’une protection incertaine contre les crises financières [qui pourrait en résulter], répond Ayhan Kose, directeur du groupe des perspectives de développement à la Banque mondiale. L’Histoire montre que les périodes de gonflement de la dette se terminent mal en général ».
Pour éviter la répétition des douloureux plans d’ajustement qui ont meurtri l’Afrique, au nord et au sud, dans les années 1980 et 1990, la Banque mondiale préconise notamment « de s’endetter avec précaution », « d’utiliser cet endettement dans des secteurs qui doperont la croissance et les exportations », de se méfier de l’endettement à court terme et en devises étrangères et de mettre en place des organismes de surveillance.
Inquiète d’une nouvelle flambée de l’inflation, la Banque conseille de supprimer les politiques de contrôle des prix qui empêchent la concurrence de jouer et qui dégradent les budgets des États, mais de les remplacer par des « filets de protection sociale » réservés aux catégories les plus pauvres.
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