Sur le papier, la promesse semble un peu folle: être 10 à 15% moins cher qu’Amazon. Pourtant, Marc Lore n’a pas manqué pas de prétendants pour investir dans Jet.com, un e-marchand d’un nouveau genre qui espère bousculer le leader américain du commerce en ligne. Jeudi 30 avril, la société a lancé une beta privée, réservée à 10.000 clients. Cinq millions de produits sont référencés. Un chiffre qui devrait doubler d’ici au lancement officiel attendu pour le début de l’été.
220 MILLIONS DE DOLLARS
A peine lancée, la start-up est déjà valorisée à près de 600 millions de dollars. Et elle a levé 220 millions de dollars pour financer son développement. Parmi ses investisseurs, on retrouve les prestigieux fonds capital-risque Bain Capital et Accel Parters. Mais aussi Google, par le biais de sa branche Google Ventures. Et également, selon Forbes, Alibaba, le géant chinois du commerce en ligne. Le service attire aussi les consommateurs. Près de 400.000 personnes s’étaient inscrites pour faire partie des premiers invités.
Si Jet intrigue, c’est avant tout grâce au CV de M. Lore, son patron et fondateur. Il y a dix ans, il se lance dans le commerce des couches sur Internet avec Diapers.com. Le succès est au rendez-vous et l’entreprise, rebaptisée Quidsi, se diversifie rapidement (produits ménagers, produits animaliers…). En 2010, elle génère 300 millions de dollars de chiffre d’affaires. Cette réussite attire alors l’attention d’Amazon. La société de Seattle souhaite racheter son concurrent.
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COMME COSTCO
Pour mettre la pression, elle casse les prix des couches sur son site, réduisant fortement la croissance des ventes de son rival. La tactique fonctionne: acculés, les responsables de Quidsi cèdent finalement aux avances de Jeff Bezos. Fin 2010, le rachat se finalise pour 550 millions de dollars. M. Lore conserve la direction de la société, restée indépendante, pendant deux et demi. Il quitte ses fonctions au printemps 2013. Il assure aujourd’hui n’avoir gardé aucune rancœur pour Amazon.
Avec son nouveau projet, l’entrepreneur veut répliquer en ligne le succès grandissant de Costco et des autres magasins-entrepôts, qui comptent 100 millions d’adeptes aux Etats-Unis. Leur principe: en échange d’une adhésion annuelle – et grâce à des coûts d’exploitation plus faibles -, ils offrent des prix inférieurs à leurs clients. Jet reprend ce modèle. L’adhésion coûtera 49 dollars par an. Les produits proposés seront en moyenne 6% moins chers, avant réduction, que sur les autres sites de commerce.
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RÉDUCTIONS
Le site va s’appuyer sur un réseau de distributeurs, nationaux et locaux. Il assurera la mise en relation avec les clients. Sur chaque achat, la société percevra des commissions versées par ses partenaires. Mais elle ne les conservera pas: elles seront redistribuées aux acheteurs sous la forme d’économies. Pour tirer les prix vers le bas, Jet récompensera aussi les acheteurs qui réaliseront des commandes groupées et qui s’adresseront à des distributeurs situés à proximité.
“A chaque fois qu’un produit sera ajouté au panier, le prix de tous les autres articles changera aussi”, explique l’entrepreneur. Alors que ses rivaux s’affrontent pour livrer leurs commandes toujours plus vite, le commerçant proposera des réductions si un client accepte d’attendre un peu plus longtemps. Même chose, s’il renonce à son droit d’échange du produit qu’il vient d’acheter. M. Lore ne craint pas la réplique d’Amazon: il sait que la société est déjà sous pression pour accroître ses marges.
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Photo: Scottish Governement