Bien que déclarée « priorité des priorités » au début des années 1980, l’agriculture n’a pas permis au Congo d’être auto-suffisant et de limiter les importations des denrées alimentaires. Les autorités veulent désormais intensifier cette agriculture en vue de diversifier l’économie du pays qui peine à minimiser sa dépendance aux revenus du pétrole.
De notre correspondant à Brazzaville,
Dans la ville sucrière de Nkayi, située dans région de La Bouenza, au sud du Congo, les espaces que le quinquagénaire Joseph exploite sont isolés au milieu de vastes champs de canne à sucre de la Société agricole de raffinage industriel du sucre (SARIS). Cet exploitant ne comprend pas pourquoi les hommes et les femmes de sa génération ne s’intéressent pas trop au travail de la terre.
« Il y a peu de gens qui travaillent dans le secteur. À titre d’exemple, il n’y a que moi qui fais des hectares dans la zone. La terre est très riche, mais les gens négligent l’agriculture ici », se lamente-t-il.
Joseph a démarré avec une houe avant d’obtenir un tracteur grâce à l’aide d’une société privée. « Au départ, les gens croyaient que l’agriculture est réservée aux pauvres. Or de nos jours, ce sont les riches qui font l’agriculture. On devient riche quand on fait l’agriculture », explique-t-il.
Un potentiel agricole sous-exploité
Le potentiel agricole du Congo est inestimable, au moins 10 millions d’hectares de terres arables, la pluviométrie est abondante. À travers le pays, les petits exploitants pratiquent essentiellement une agriculture d’autoconsommation. Les autorités veulent désormais imprimer un rythme d’intensification de l’agriculture.
L’engagement politique est clairement exprimé, selon Isidore Ondoki, coordonnateur national du Projet d’appui au développement de l’agriculture commerciale. Il pense que le temps n’est plus au discours.
« On ne peut pas avoir une priorité qui n’est qu’une priorité des déclarations. Il faut qu’on passe des déclarations de nos autorités à leur concrétisation. C’est-à-dire, lorsqu’on lit le budget de l’État congolais, on doit sentir que le gouvernement est en train de révolutionner son agriculture par les moyens qu’on met à la disposition du secteur », conseille monsieur Ondoki.
« Ce qu’il nous faut, c’est une agriculture hybride »
Sur le terrain Isidore Ondoki dit ce qu’il faut faire concrètement. « Ce que nous entendons par l’intensification de l’agriculture, c’est premièrement la mécanisation, donc faire l’agriculture par la machine. Deuxièmement, lorsqu’il y a la machine, on doit avoir des étendues culturales très grandes. Troisièmement, il faut travailler pour le rendement. Celui-ci se travaille par la préparation des sols, c’est-à-dire l’amélioration de la qualité des sols, mais aussi la qualité des semences agricoles », affirme-t-il.
Secrétaire exécutif de l’Observatoire congolais des droits des consommateurs, Mermans Babounga a une proposition. « Ce qu’il nous faut, c’est une agriculture hybride où nous aurons d’un côté une agriculture industrielle et de l’autre une agriculture familiale », propose Mermans Babounga.
En attendant de changer la politique agricole, le pays continue d’importer ses denrées alimentaires des pays voisins et des pays lointains pour 700 milliards de francs CFA par an. Ce montant équivaut à 25 % du budget du Congo pour 2019 ou à 64,6 % du budget en 2020 !
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