Retard de vaccination en Afrique du Sud, Kigali reconfinée et hausse de l’insécurité alimentaire.
EN AFRIQUE DU SUD, LA VACCINATION MISE À MAL PAR LES ÉMEUTES
La campagne de vaccination a dû être localement suspendue en raison des violences qui secouent depuis six jours les provinces du Gauteng (Johannesburg) et du Kwazulu-Natal (Durban), dont le bilan s’élevait, vendredi 16 juillet, à au moins 117 morts. Le pays, le plus touché du continent par la pandémie, traverse une sévère troisième vague de contaminations au coronavirus (SARS-CoV-2).
Le variant Delta a pris le pas sur les autres formes du virus et sa grande contagiosité y provoque une hausse exponentielle des cas. « Nous avons pour l’instant dû suspendre les vaccinations dans le Kwazulu-Natal », aindiqué, mercredi 14 juillet, dans un communiqué le groupe hospitalier privé Netcare.
Difficultés d’acheminement des médicaments
Médecins sans frontières (MSF), présente dans la région, a également dû interrompre certaines activités. « Il est urgent de veiller à ce que les établissements et les fournitures de santé ne soient pas pris pour cible », a déclaré l’ONG.
Le principal problème est lié aux difficultés d’acheminement des stocks de médicaments vers les centres de santé, les transports reliant la capitale économique Johannesburg et l’Est étant entravés. Les personnels soignants ont aussi été empêchés de se rendre dans les hôpitaux, dont certains ont dû être temporairement fermés.
A l’origine provoquées par l’emprisonnement le 8 juilletde l’ancien président Jacob Zuma, les violences se sont intensifiées ces derniers jours sur fond de crise économique et de chômage, créant un afflux de blessés dans les services hospitaliers d’urgence, alors que médecins et infirmiers sont débordés et épuisés par la gestion de la crise sanitaire.
L’Afrique du Sud compte plus de 2,2 millions de cas de contamination et 65 100 décès, dont 633 sur les dernières vingt-quatre heures.+ 43 %
C’est la hausse du nombre de décès liés au Covid-19 sur le continent ces sept derniers jours, d’après les chiffres croisés de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et du Centre africain de contrôle et de prévention des maladies (Africa CDC).
C’est la cinquième semaine consécutive de hausse, alors que de plus en plus de pays font face à des pénuries d’oxygène médical, de lits de réanimation et de personnels. « Il s’agit d’un signal d’alarme clair indiquant que les hôpitaux des pays les plus touchés atteignent un point de rupture », a averti la docteure Matshidiso Moeti, directrice de l’OMS Afrique, lors du point hebdomadaire de l’agence onusienne, jeudi. Si la plupart de ces nouveaux décès sont enregistrés en Namibie, en Afrique du Sud, en Tunisie, en Ouganda et en Zambie, le nombre de contaminations a bondi en Algérie, au Rwanda et au Sénégal, notamment.
Cette accélération s’explique en grande partie par la présence du variant Delta, extrêmement contagieux et désormais détecté dans vingt et un pays du continent. En un mois, les contaminations ont augmenté d’un million, passant la barre des 6 millions.
AU RWANDA, KIGALI RECONFINÉE
Le Rwanda a annoncé, mercredi, le reconfinement de la capitale Kigali, ainsi que de huit autres districts, à partir de samedi et jusqu’au 26 juillet, pour endiguer l’explosion de cas de coronavirus enregistrée ces dernières semaines. « Les citoyens sont invités à réduire considérablement les interactions sociales et à limiter les déplacements aux seuls services essentiels, a annoncé le gouvernement. Les mouvements et visites hors du domicile sont interdits, sauf pour les services essentiels comme la santé, l’achat de nourriture, les banques. »
Les transports publics sont arrêtés, les bureaux du secteur public comme privé ainsi que les écoles sont fermés, les activités sportives et récréatives en plein air interdites et le nombre de personnes assistant aux enterrements plafonné à quinze. Les arrivées et départs à l’aéroport de Kigali sont toutefois maintenus, ainsi que les activités touristiques, dans le respect des protocoles sanitaires en vigueur et du couvre-feu.
Le Rwanda avait jusqu’à présent réussi à contenir l’épidémie grâce au confinement strict et au traçage des cas contacts appliqués dès mars 2020.Il a été aussi l’un des premiers pays à lancer sa campagne de vaccination début 2021. Mais il a pâti des difficultés d’approvisionnements provoquées par la défaillance du mécanisme de solidarité internationale Covax. Au 14 juillet, seulement 3 % des Rwandais étaient vaccinés. Le pays s’est fixé pour objectif de vacciner 30 % de sa population cette année et 60 % d’ici à la fin 2022.
Le Rwanda, qui compte 13 millions d’habitants, a enregistré un total de près de 51 000 cas de contamination, dont 607 décès.
LA PANDÉMIE AGGRAVE L’INSÉCURITÉ ALIMENTAIRE
La pandémie de Covid-19 aura des effets à long terme sur la sécurité alimentaire mondiale, après avoir contribué en 2020 à une envolée du nombre de personnes confrontées à la faim, selon le rapport annuel sur la faim dans le monde publié, le 12 juillet, par l’Organisation des Nations unies pour l’agriculture et l’alimentation (FAO).
Le rapport estime à entre 720 millions et 811 millions le nombre de personnes sous alimentées dans le monde en 2020, soit une augmentation de 18 % sur un an. 282 millions vivent en Afrique où 21 % de la population souffre de la faim. 46 millions de personnes supplémentaires y ont basculé dans l’insécurité alimentaire en 2020. Les effets de la pandémie sont venus s’ajouter aux causes traditionnelles comme les catastrophes naturelles et de la persistance des conflits.
Des restrictions de déplacement
Sans surprise, ce sont dans les zones les plus fragiles que la situation s’est rapidement dégradée, selon la FAO. Les pays du Sahel, l’Afrique subsaharienne plus largement et, à l’est, la République démocratique du Congo (RDC), notamment, qui sortait juste de la crise Ebola, sont particulièrement touchés. Les restrictions de déplacement ont par exemple empêché les petits agriculteurs de vendre leur production sur les marchés, les privant de revenus pour subsister tandis que les villes ont connu des problèmes d’approvisionnement qui ont fait grimper les prix.
DES FRAUDES AUX TESTS PCR EN OUGANDA
Alors que l’Ouganda lutte contre sa troisième vague, le pays risque d’être placé sur liste rouge pour violation des règles sanitaires internationales émises par l’OMS. Un grand nombre de voyageurs en provenance de l’aéroport international d’Entebbe auraient été diagnostiqués positifs à l’aéroport de leur pays d’arrivée, alors que leur certificat de test PCR, obtenu avant leur vol en Ouganda, indiquait le contraire. Kampala n’a cependant pas voulu révéler le nombre exact de personnes concernées.
Le ministère de la santé, qui attribue la fraude à des hackers qui auraient pénétré le système central de contrôle des résultats de tests, s’empresse de préciser que la qualité des tests réalisés par les laboratoires ougandais et leurs résultats ne sont pas en cause. Devant la presse, mercredi, le porte-parole du ministère, Emmanuel Ainebyoona, a annoncé l’ouverture d’une enquête et dénoncé « des individus sans scrupule », pointant la responsabilité d’entreprises qui emploient de la main-d’œuvre étrangère. Le gouvernement a décidé de retester toute personne entrant sur son territoire.
lemonde.fr