L’Albanie a décidé d’en finir avec les paris, source de profit pour le crime organisé, mais aussi de drames pour les familles des joueurs. Le 1er janvier, une nouvelle loi est entrée en vigueur. Elle interdit les jeux d’argent, ainsi que les paris en ligne dans ce pays des Balkans de 2,8 millions habitants, un des plus pauvres d’Europe.
Selon une étude del’Université publique de Tirana, un parieur sur quatre a au moins une fois tenté de se suicider et 70% d’entre eux ont des problèmes psychologiques. Une dépendance au jeu qui était souvent source de drames dont les conjoints et les familles des joueurs ont fait les frais, soutiennent les associations des victimes. Adrian Civici, président de l’Université européenne de Tirana, rappelle : « Les personnes qui étaient concernées par les jeux de hasard représentaient les couches pauvres de la population. Souvent, ces personnes étaient sans emplois. Une grande partie des jeunes s’adonnait également aux jeux. Régulièrement, on lisait dans la presse ou on entendait des histoires sur les gens qui ont perdu tout leur argent, alors qu’ils étaient déjà pauvres. Un problème qui a finalement touché la société albanaise dans son ensemble ».
La loi a entraîné la fermeture des 4 300 bureaux de paris. Un changement radical opéré dans un pays, où ces lieux étaient jusque-là présents à tous les coins de rue. Une décision très contestée par les propriétaires des bureaux de paris, qui se retrouvent sans emploi, mais plutôt bien accueillie par la population, affirme ce professeur : « La plupart des gens interviewés sont montrent contents. On perçoit la même satisfaction quand on parle dans la rue. Ces bureaux de pari ont poussé un peu partout, jusqu’au centre-ville, dans les petites villes, ainsi que dans les villages où ils ont remplacé petit à petit les bars ou les restaurants, tous les lieux où s’organisait avant la vie sociale. »
Pour le gouvernement socialiste, la loi a pour but de combattre le blanchiment d’argent et la corruption. « La guerre contre le crime organisé va se poursuivre, car les criminels changent de stratégie », a déclaré le Premier ministre albanais, Edi Rama, à la télévision. Les paris en ligne sont également interdits. Seuls les casinos des hôtels de luxe ont été maintenus. Quant aux compagnies des jeux d’argent, la plupart d’entre elles ont déjà transféré leurs affaires au Kosovo et en Macédoine voisine. « Une partie des Albanais, notamment les habitants des zones frontalières avec ces pays, s’ils veulent continuer à jouer, pourront le faire juste en franchissant la frontière », explique Adrian Civici. Sans la coopération de ces pays, la loi entrée en vigueur en Albanie risque d’avoir une portée limitée.
rfi.fr